L’utilisation de progestagènes à base d’altrénogest est une pratique répandue en élevage porcin qui facilite l’introduction des jeunes reproducteurs dans une bande. Le progestagène est une hormone qui va simuler une pseudo gestation chez la femelle et bloquer ainsi son cycle oestral.
A l’arrêt du traitement la croissance folliculaire va redémarrer et aboutira à l’expression de la chaleur 5 à 7 jours après la dernière dose. Comme tout produit hormonal, il est important de respecter la durée du traitement (18 jours) mais aussi la dose administrée (20 mg/truie/jour). L’administration de ce produit doit être réalisée quotidiennement à heure fixe sur des animaux pubères et non stimulés par des vecteurs extérieurs comme des verrats ou des truies en chaleur. Souvent perçu comme une tâche chronophage, la distribution du progestagène lors qu’elle est bien réalisée permet une optimisation de la gestion de l’élevage tout en créant un contact positif en l’éleveur et les animaux qui favorise la détection des chaleurs mais aussi la manipulation des animaux.
L’objectif de ce document est d’expliquer le mode de fonctionnement du progestagène et d’identifier les facteurs clefs de réussite du traitement.
I – Explication du cycle œstral de la truie
Le cycle œstral de la truie d’une durée moyenne de 21 jours peut de diviser en 2 phases :
- La phase lutéale débute après l’ovulation et dure de 13 à 15 jours, période pendant laquelle les corps jaunes sont présents à la surface des ovaires et secrètent de la progestérone.
- La phase folliculaire d’une durée comprise entre 4 à 6 jours qui correspond à la phase de croissance des follicules pré-ovulatoires et aboutissant à une nouvelle chaleur et une nouvelle ovulation.
II- Mode de fonctionnement de l’altrénogest
L’altrénogest (qui est un analogue à la progestérone) est une molécule de la famille des stéroïdes utilisé en élevage porcin pour faciliter l’introduction des truies ou des jeunes reproducteurs dans un groupe d’animaux mis à la reproduction à un moment précis.
Son fonctionnement repose sur la maîtrise de la sécrétion de la GnRH produites par l’hypothalamus et des hormones LH et FSH produites par l’hypophyse comme résumé ci-dessous.
Distribué quotidiennement par voie orale chez des animaux pubères, l’altrénogest (qui est un analogue à la progestérone) va maintenir l’inhibition de la production de la FSH et de la LH par l’hypothalamus bloquant ainsi le cycle œstral en induisant une pseudo gestation.
Au niveau des ovaires durant la distribution, la croissance folliculaire est maintenue mais ne peut excéder trois mm et les follicules ayant une taille supérieure à cinq mm régressent.
A l’arrêt de la distribution, l’inhibition de la production de FSL et de LH est levée, le cycle redémarre à la phase folliculaire et la chaleur s’exprime 5 à 7 jours après l’arrêt du traitement.
III – L’utilisation de l’altrénogest
En fonction des pays, la durée et la posologie du traitement peuvent varier. Par exemple, aux USA, il sera distribué 15 mg d’altrénogest par truie et par jour pendant 14 jours alors qu’en Europe la dose quotidienne est de 20 mg par truie et par jour sur une durée de 18 jours.
Cette différence s’explique par l’approche américaine considérant que le traitement doit couvrir simplement la phase lutéale (de 12 à 13 jours) alors qu’en Europe, l’utilisation est basée sur le respect d’un cycle régulier d’environ 21 jours (18 jours de traitement + X jours de venue en chaleur). Selon le jour de démarrage, le jour est déterminé dans le tableau ci-dessous (base distribution 18 jours) :
- Le traitement peut débuter à n’importe quel moment du cycle.
- Distribuer à heure fixe
Compte tenu du fait de biodisponibilité rapide du produit (entre 1h et 4h après l’ingestion) et que la demie vie est atteinte au bout de 14 heures, il est nécessaire d’intégrer sa distribution comme un travail quotidien à réaliser à heure fixe afin d’éviter des échecs de venue en chaleur.
- Assurer une prise complète de la dose quotidienne
Il est à noter qu’une sur-exposition au produit est sans conséquence alors qu’un sous dosage <13mg /truie/ jour est associé à un risque de développement ovarien expliqué par l’écrêtage du pic de LH.
- Précautions particulières à prendre par la personne qui administre le médicament vétérinaire aux animaux
Tout contact direct avec la peau doit être évité. Porter des vêtements de protection (gants et autres protections) pendant la manipulation du produit. Des gants poreux peuvent laisser traverser le produit. Lors d’aspersion accidentelle, la peau doit être lavée immédiatement avec de l’eau et du savon.
L’absorption transcutanée peut être encore plus élevée lorsque la zone est recouverte d’un matériau occlusif, comme des gants en latex ou en caoutchouc.
Se laver les mains après le traitement et avant tout repas.
En cas de contact accidentel avec les yeux, rincer abondamment à l’eau pendant 15 minutes.
Les femmes enceintes, ou pouvant l’être, ne doivent pas manipuler le produit. Les femmes en âge de procréer doivent manipuler le produit avec une extrême précaution. Le produit ne doit pas être manipulé par des personnes présentant des tumeurs progestérone-dépendantes connues ou suspectées ou des troubles thromboemboliques.
Effets d’une surexposition : une absorption accidentelle répétée peut conduire à l’interruption du cycle menstruel, des crampes (ou douleurs) utérines ou abdominales, une augmentation ou une diminution des saignements utérins, la prolongation de la durée de gestation ou des maux de tête.
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IV- L’influence de l’environnement des animaux traités
La distribution du produit peut se faire soit directement dans la gueule, soit dans l’auge. Bien que le produit soit très appétant, il est recommandé de recouvrir le produit avec une poignée d’aliment afin d’avoir des animaux statiques le temps de lécher la totalité du produit.
- La distribution dans l’auge est à proscrire en présence d’eau dans celle-ci
- Préférer la distribution de l’altrénogest dans la gueule
Pour des animaux logés en groupe ou dans une situation où il est impossible d’assurer la qualité de la distribution individuelle. Cette technique nécessite une phase d’apprentissage chez les jeunes animaux ce qui la rend plus chronophage comparé à la distribution dans l’auge. Cependant l’avantage est de créer un contact positif et régulier entre l’éleveur et les animaux ce qui contribue à faciliter les déplacements mais surtout la détection des chaleurs au moment des inséminations. Il est reconnu que les élevages ayant des animaux non craintifs sont plus productifs.
- Eviter toutes stimulations durant la phase de distribution
Compte tenu des effets recherchés, bloquer le cycle via la baisse de sécrétion de FSH et LH, afin d’éviter « appuyer sur le frein et l’accélérateur en même temps ». En élevage, les femelles recevant le traitement devront être logées dans les cases éloignées de celle des verrats, ou une case éloignée de son passage. Il est également conseillé de placer les animaux en traitement hors du contact de femelles sevrées ou en venue de chaleur.
Afin de favoriser l’adaptation des cochettes au microbisme de l’élevage, il est conseillé de réaliser le traitement à l’altrénogest dans une salle en présence de truies multipares (et bien sûr éloigné des verrats).
V- Arrêt du traitement et mise à la reproduction
Bien que l’expression des chaleurs puissent être obtenues sans stimulation extérieure, il est conseillé d’associer l’arrêt du traitement à des pratiques, dans le but de favoriser l’expression et d’homogénéiser le moment des venues en chaleur parmi lesquelles :
- Transfert de salle
Le lendemain de la dernière distribution, le jour du sevrage, le transfert des cochettes en verraterie et le mélange avec les truies sevrées constituent un stress homogène à l’ensemble du groupe.
La réalisation de cette pratique au moment du sevrage permet d’appliquer à toute la bande le même protocole (douche, vitamine, programme alimentaire…) et facilite l’organisation du travail (stimulation, détection…).
Il est important de noter que la réalisation d’un stress alimentaire ou un déplacement 2 à 3 jours après l’arrêt du traitement ne présente pas d’intérêt et peut dans certain cas avoir des effets négatifs sur l’expression de la chaleur ou la fécondité.
- Stress alimentaire
Pour les cochettes, il n’est pas nécessaire de réaliser une diète alimentaire pour stimuler la venue en chaleur. Si elle est réalisée, la diète alimentaire doit être faite le lendemain de l’arrêt du traitement. Un ou deux repas pourront être supprimés mais l’eau devra être maintenue.