Sélection de la pintade : forces et faiblesses

Partner(s): Grimaud Frères
Industry(ies): Other poultry

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Évolution de la production de la pintade

Le nom savant de la pintade est Numida Meleagris, ce qui rappelle l’appellation commune de poule de Numidie, qu’on lui attribuait jadis. Actuellement, la pintade en Europe est connue sous son aspect gris perlé de blanc, mais il existe plusieurs phénotypes : lilas, violet, blanc, napoléon, rachel, isabelle, …En Afrique, on dénombre des millions de pintades sauvages, qui sont répertoriées  en 7 espèces. D’origine africaine, la pintade commune est observée à l’état sauvage, ou en culture vivrière autour des villages, avec une croissance très inférieure à celle de la pintade commune européenne.

La pintade se caractérise avant tout par son image de gibier, tant par son aspect que par ses qualités gustatives, qui la démarquent du poulet. C’est une viande diététique, peu grasse. Ses performances en élevage standard sont bien différentes du poulet : 1.7kg à 11 semaines avec un indice de consommation de 2.8, mais s’en rapprochent en label : 2.100kg à 14 semaines avec un indice de 3.5.

Histoire de sa production

Connue depuis l’antiquité dans tout le pourtour méditerranéen, la pintade était élevée vers les années 1960 en Italie  et dans le sud-est de la France (Drôme-Gard). Sa production était saisonnière et sa sélection était compliquée à cause de son comportement de ponte en nids collectifs. En1966, M Petitjean, chercheur à l’INRAE, a mis au point l’insémination artificielle sur la pintade. La diffusion de cette technique et la maitrise des programmes de photo-stimulation en bâtiment de claustration ont permis de désaisonner la production et de démarrer la sélection généalogique.

Actuellement, son marché est resté principalement franco-italien (80% / 20%), avec quelques ventes confidentielles au Brésil et aux USA. En France, elle représente un peu moins de 3 % de la volaille de chair. Sa production est de 22 000 tonnes annuelles. Elle avait atteint 55 000t dans les années1990-2000 et a diminué ensuite plus rapidement que les autres volailles françaises. Elle conserve néanmoins sa place de 2ème volaille label après le poulet.

La filière pintade française bien structurée s’est regroupée au sein d’une interprofession nommée CIP (Comité Inter- professionnel de la Pintade). La sélection approvisionne un marché d’environ 160 000 reproductrices par an en France, de 40000 en Italie et 10000 dans le reste du monde (USA-Brésil). La production chair s’appuie sur 1200 éleveurs. Avec plus de 2 millions de pintadeaux et près d’1 million d’OAC exportés en Italie, et environ 5000 tonnes équivalent carcasse de viande de pintade exportées vers la Belgique, l’Allemagne et le Royaume-Uni, l’export pèse 27 millions d’euros contre un import quasi nul. Le bilan commercial de la filière pintade est très positif.

Accouvage et sélection

Dans les années 1960, deux accouveurs français fondent leurs lignées : Galor et Béghin. Un troisième accouveur fonde ensuite les lignées Lesayec, dont sont issues les lignées Essor. L’accouvage comptait en 1980 une dizaine de couvoirs. De nos jours, il ne subsiste en produits commerciaux que la lignée GALOR distribuée par un seul sélectionneur : GRIMAUD FRERES SELECTION. Il ne reste que 4 couvoirs en France et 2 en Italie.

Dès ses débuts, Galor s’est appuyé sur les services du SYSAAF (Syndicat des sélectionneurs avicoles et aquacoles français) constituant l’un de ses tout premiers adhérents.

La sélection des lignées a débuté à partir des animaux présents localement dans les fermes. Tout en homogénéisant les couleurs de plumage, l’axe principal était l’alourdissement des souches tout en respectant un schéma classique en aviculture de croisement des lignées. A partir d’allèles de couleur de plumage liés au sexe (isabelle chez Galor et blanc chez Essor), ont été développées des lignées capables de produire des croisements autosexables. Parallèlement, l’accentuation de l’aspect foncé des pattes et de la peau a permis de signer toutes les lignées Galor.

De nos jours, le groupe Grimaud joue pleinement le rôle de conservateur de la biodiversité, d’une part en entretenant la sélection d’une pintade de couleur violette, la Perle Noire, spécifique d’un marché local, d’autre part en sauvegardant plusieurs phénotypes différents (couleur lilas, isabelle, blanc, chamois). Les lignées Essor mises en retrait du marché depuis 2022 sont toujours travaillées par sécurité génétique mais non commercialisées.

En regard des besoins de la filière, la volonté est avant tout de préserver l’aspect gibier (couleur de la peau et des pattes), de préserver le poids et l’âge d’abattage afin de conserver intactes les qualités organoleptiques de la pintade.

Les enjeux de la sélection de la pintade

Face à cette situation apparemment figée les besoins de sélection sont réels. La pintade est élevée dans les mêmes bâtiments que les poulets, souvent en rotation notamment en label. Elle entre directement en concurrence avec les autres volailles sur le plan économique. Pour qu’elle reste compétitive, on doit réduire les coûts de production dans la filière :

  • 1er axe : améliorer l’indice de consommation favorisant l’éleveur
  • 2ème axe : améliorer les rendements de découpe favorisant l’abattoir
  • 3ème axe : maintenir le nombre de pintadeaux produits par reproductrice favorisant l’accouveur.

Dans cette petite filière, les moyens de sélection sont plus faibles que pour la plupart des autres volailles. Toutefois des outils spécifiques sont dédiés sur deux sites. L‘indice de consommation est mesuré en cage d’indice, avec mangeoires de contrôle d’aliment ; les rendements découpe le sont sur collatéraux à l’abattoir ; le contrôle de ponte et la reproduction généalogique se font en cage individuelle ; la production spermatique est mesurée à l’aide de photomètre ; l’enregistrement des milliers de données individuelles est faite sur des ordinateurs robustes et mobiles, dont les programmes sont conçus par le SYSAAF.

Le groupe Grimaud ouvre l’accès à des technologies de pointe : le scanner, pour mesurer les différents tissus; les mangeoires automatiques, pour mesurer au sol l’indice de consommation, avec en contrepartie, la nécessité d’adapter ces technologies à la pintade et d’équilibrer leur coût avec l’économie de la filière.

Avenir de la production et de la sélection de la pintade

Pour l’accouvage, le défi est la mise en cause de son mode de reproduction et le retour au sol en monte naturelle. Des essais infructueux ont eu lieu par le passé et à l’heure actuelle, un test a lieu au Togo à l’initiative du CIP afin de comprendre comment se fait la reproduction naturelle en comparant notre souche française à la lignée locale. La fertilité au sol des souches française est proche de zéro malgré une production spermatique suffisante.

Pour conserver la sélection généalogique dans un modèle de production au sol, la pintade est inscrite dans le projet de recherche « ResiGen », porté par le Sysaaf, qui va définir un panel d’assignation de parenté que l’on pourra ensuite utiliser dans nos lignées par la lecture individuelle de l’ADN parental et filial. Au-delà de cette avancée, la filière pintade ne peut pas développer la sélection génomique, beaucoup trop coûteuse pour l’instant. Nous sommes à l’écoute de la recherche fondamentale et ouverts au développement d’outils améliorant la productivité : colorimétrie du sang et indice de consommation, protéines du sperme et fertilité…

Conclusion

La pintade est un exemple de petite filière avec une sélection efficace mais disposant de peu de moyens. Elle doit lutter pour garder sa place dans le paysage avicole français et doit préserver le savoir-faire de ses éleveurs, un maillon essentiel de la filière. Pour cela, il lui faut vaincre ses défauts : dépasser le cadre franco-italien et améliorer son taux de pénétration parmi les consommateurs (20% seulement font un acte d’achat). La pintade doit s’appuyer sur ses réussites : son organisation en filière et en interprofession (CIP) ; la promotion de la pintade en Europe (ex : Allemagne) ; le développement de son export avec l’Afrique, qui connait parfaitement et consomme la pintade ; le maintien de la qualité gustative de la pintade, tant appréciée par nos grands chefs ; et sur ses travaux de recherche. Beaucoup de défis à relever et le monde à conquérir.

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Guinea fowl production manager

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